A 35 ans, Jean-Charles Verdalle termine sa 1ère saison au micro du FCN. Quand il est né, son prédécesseur Yannick Bigaud était déjà speaker du club ! Merci à Jean-Charles pour cet échange passionnant, réalisé quelques heures avant FCN-PSG. Cela me permet aujourd’hui de vous présenter la nouvelle voix du FC Nantes. Entretien.
Tout d’abord peut-on en savoir plus sur ton parcours professionnel ?
Cela fait 16 ans que je suis dans le monde du travail. Après une formation commerciale, j’ai occupé différents postes dans divers domaines avec plusieurs niveaux de responsabilité. J’ai également travaillé dans l’immobilier. Dans ces activités, dès qu’il y avait des soirées d’entreprise avec des fournisseurs ou partenaires j’étais sollicité pour l’animation. J’ai toujours aimé ça donc je ne refusais pas ! Ça me vient aussi de mon père qui faisait ça plus jeune.
Comme j’ai toujours eu envie de créer ma boite, je me suis lancé en 2017 avec Partners & Com : une société qui accompagne les entreprises dans la mise en place de partenariats. J’ai aussi une activité d’animation en dehors du FCN : tables rondes, conférences…
Préfères-tu qu’on dise « speaker » ou « animateur » ?
En fait il s’agit un peu des deux. Pour remplacer Yannick Bigaud le FC Nantes recherchait quelqu’un qui puisse être speaker pendant les matches mais aussi animer les événements avec les abonnés et les partenaires. Cela tombait bien car ça correspondait à mon activité. Par définition on peut donc parler de speaker pour la partie sportive et d’animateur pour les autres événements.
Que représente le FC Nantes pour toi ?
Pour plusieurs raisons personnelles j’ai beaucoup d’affinité avec le club. Déjà mon frère était au centre de formation à l’époque de Ziani, Ouedec, Moreau… Malheureusement il a été gravement blessé donc il a dû arrêter le football. D’autres personnes au sein du club et de l’association FC Nantes font que je baigne vraiment dans cet univers ! Je suis un fan de foot et du FCN évidemment, car j’ai toujours vécu ici.
« L’hymne à la Beaujoire n’est pas parti ! Comme je le connais par cœur, je me suis mis à chanter a capella. »
Peux-tu nous en dire plus sur ton arrivée au FC Nantes ?
En mai 2018, j’ai lu l’article (20 minutes) au sujet de la fin de carrière de Yannick Bigaud. J’ai un copain qui m’a tagué sur Facebook. J’ai alors envoyé un mail au FC Nantes pour savoir comment candidater. J’ai eu un entretien à la Jonelière, puis j’ai été rappelé le 21 juin pour faire un test. La saison était terminée donc cela s’est passé dans le stade vide ! C’est d’ailleurs beaucoup plus impressionnant que quand il est plein, assez bizarrement. Nous étions plusieurs pour cette simulation, comme s’il y avait un vrai match. Quand mon tour est venu, il y a eu un souci technique : l’hymne à la Beaujoire n’est pas parti ! Comme je le connais par cœur, je me suis mis à chanter a capella. Quelques jours plus tard, j’ai su que j’étais pris, un rêve de gosse qui se réalisait : prendre le micro dans un stade que j’ai toujours connu. D’ailleurs j’aurais bien voulu connaître Marcel Saupin aussi !
Comment s’est passée ta préparation, as-tu un modèle ?
Pour la préparation j’ai rencontré Yannick Bigaud, j’ai échangé avec lui avant le match de reprise contre Monaco. Il a été de très bon conseil. La difficulté c’est de ne pas faire comme lui. À la Beaujoire, comme beaucoup, je n’ai connu que Yannick au micro. Naturellement on a envie de faire pareil, comme quand tu joues à la PlayStation avec tes potes et qu’après un but tu cries « Ouuhhhhhhhhh… », mais il ne fallait pas faire ça !
J’ai aussi échangé avec Fabrice Mauro le speaker de Nice. Lui comme Yannick m’ont conseillé de ne pas réinventer ce qui existait déjà. L’idée était « simplement » de suivre ce que j’avais à faire puis au fur et à mesure d’ajouter des éléments, ma signature vocale… A la télé j’ai toujours une oreille attentive aux autres speakers. J’ai aussi pu être en contact avec celui du Groupama Stadium à Lyon. Autrement j’ai regardé des vidéos du speaker de Naples quand il faisait scander le nom d’Higuain, mais c’est différent !
Quelles ont été tes premières sensations au micro ?
Le premier match reste un souvenir incroyable car il y avait 33 000 personnes. Il faisait très beau et l’adversaire était prestigieux (Monaco). Je me revois encore avec la voix tremblante, un peu d’appréhension. Parler devant tout ce monde ce n’est pas facile ! Le plus beau souvenir ce jour-là reste la composition d’équipe. Quand tu dis « Votre capitaine, numéro 28 : Valentin… » et que tout le stade reprend « RONGIER ! » franchement ça met des frissons. J’en ai limite eu les larmes aux yeux. Déjà c’est beau de voir tout un stade à l’unisson, ensuite égoïstement on se dit « ça y est j’y suis, c’est parti ! ». Entre le moment où ils m’ont téléphoné pour me dire que j’étais retenu et le premier match, plusieurs semaines se sont écoulées. Je suis parti en vacances, j’ai travaillé un peu sur la Ligue 1, les transferts, car c’est important de respecter le nom des joueurs. Quand le 1er match arrive c’est vraiment spécial. Après au fil des matches j’ai pris mes aises. Maintenant je suis plus libre dans mes textes, je sais ce que j’ai à dire et je le fais à ma manière.
Comment se passe un soir de match et sa préparation ?
3 jours avant je reçois un « déroulé » qui m’indique ce qui va se passer avant la rencontre. J’arrive plus de 3h avant le match, ça me permet de prendre l’atmosphère et d’aller voir tout le monde : stadiers, staff, associations de supporters, télévision, délégués, sans oublier Riri ! Avec le club et l’équipe technique on prépare les différentes interventions : pour la boutique, la billetterie, les animations d’avant-match, l’hymne, les compositions d’équipe. Tout est calé.
Pendant le match je préfère prendre un peu de hauteur. Ça me permet de mieux voir le jeu. Ça serait dommage de se tromper de buteur ! Je reste attentif aux événements du match car à la fin je fais l’interview de 2 joueurs pour les partenaires.
Comment as-tu vécu la disparition d’Emiliano Sala, un événement tragique pour ta première saison ?
L’accident s’est produit le 21 janvier, des informations sont arrivées tard dans la nuit. Quand je me suis réveillé, j’avais plein de messages. Je ne comprenais pas. Je suis allé voir sur internet et les réseaux sociaux. C’est difficile à réaliser, on se pose tellement de questions. Le club a décidé à juste titre d’annuler les animations d’avant-match. Je me suis demandé comment ça allait se passer avec les supporters. Moi pendant le match je ne fais rien, tout le mérite revient à la tribune Loire et aux supporters en général. J’ai vu que beaucoup de choses se préparaient sur les réseaux sociaux. L’hommage a été très bien fait, je devais m’effacer.
Sala était très aimé dans ce stade, et l’est toujours. J’ai suivi mon instinct et décidé de continuer à l’inclure dans la composition, et ce au moins jusqu’à la fin de saison. J’avais reçu des demandes sur Twitter. Les supporters apprécient de pouvoir encore scander son nom. C’est important de ne pas l’oublier. Sur les matches de Nîmes et Saint-Étienne on s’est même posé la question du nom des buteurs. On aurait pu annoncer Emiliano. Finalement on ne l’a pas fait, l’hommage rendu était beau.
Parlons de choses plus joyeuses, quel est ton plus beau souvenir ?
Il y en a plusieurs. Le plus récent reste la victoire contre Lyon [rappel : interview réalisée avant FCN – PSG !]. On ne s’attendait pas forcément à ce résultat. C’est facile à dire maintenant mais je le sentais bien. Avec le stade bien garni, le but de Limbombé important pour lui comme pour le club, c’est un joli souvenir. Je retiens aussi la période où Vahid est arrivé, avec des 4-0 et 5-0 contre Toulouse et Guingamp. Il y a eu un engouement assez fort, un souffle nouveau.
Si on met de côté le drame Emiliano Sala, y’a-t-il eu des moments plus compliqués, des soucis techniques, etc. ?
Le micro qui ne marche pas, ça arrive quelques fois ! C’est embêtant, mon rôle est de relayer l’info, mais ça arrive dans tous les stades. Les moments plus difficiles ont été les matches où on menait 2-0 et qu’ensuite on perd 4-2 et 3-2 [matches face à Nîmes et Lille], ça c’est très dur !
« C’est une ville de foot, il y a une âme dans ce club. »
Parle-nous un peu de la suite, tu es prêt à faire 40 ans comme Yannick Bigaud ?
Je ne sais pas si je ferai autant que Yannick Bigaud (rires). On va se réunir avec le club en fin de saison pour savoir s’ils veulent continuer avec moi ou pas. Je ne suis pas engagé sur un nombre de saisons. Je suis prestataire et non salarié. Le FCN ou moi-même pouvons arrêter à tout moment, même si ce n’est pas le but ! Pour moi c’était la découverte cette saison. J’avais prévenu ma femme qu’on allait moins se voir le week-end. En plus il y a eu des matches décalés, ce n’est pas simple, mais je n’en ai raté aucun. J’espère être toujours là la saison prochaine, et si tout va bien ça sera le cas. Quoi qu’il arrive j’apprécie ce que je fais, c’est un plaisir d’échanger avec les supporters, notamment sur les réseaux sociaux. C’est une ville de foot, il y a une âme dans ce club, ce n’est pas le cas partout ! Les joueurs commencent aussi à s’habituer à moi, c’est sympa, il y a une complicité.
Souhaites-tu changer des choses par la suite dans ta façon de faire, les animations ?
J’ai déjà imposé ma signature sur l’annonce des buts. Pour changer des choses je dois en parler avec le club, ce qui est normal. Ils sont vraiment à l’écoute, c’est très agréable. J’ai toujours plein d’idées (elles ne sont pas toutes bonnes !), et l’inspiration vient aussi en discutant avec les speakers d’autres stades. J’aimerais qu’on puisse encore plus mettre en avant les supporters dans les animations d’avant-match. Il faut trouver le bon format et le bon équilibre mais il y a plein de choses à faire.
Ton avis sur la saison qui s’achève sur le plan sportif ?
Cette saison restera particulière pour le club suite au drame qui a touché Emiliano Sala. Si je parle en tant que supporter, il faut se dire que l’objectif du maintien est atteint. C’était difficile d’imaginer plus en début de saison. Pour la suite j’aimerais encore du spectacle, car le jeu de Nantes est bon, même s’il y a quelques trous d’air. Il faut que le spectacle soit sur la pelouse et en dehors, moi je suis le trait d’union entre les deux.
Pour terminer, un petit mot pour les supporters ?
Je tiens à remercier du fond du cœur les supporters. C’est une réponse très politique, on dirait que je fais campagne (rires), mais c’est vrai ! Sans supporters il n’y a pas de club. Si demain il n’y a pas de speaker, il y aura quand même des chants qui vont raisonner à la Beaujoire, et ça on le doit aux supporters. Je leur tire mon chapeau car ça a un coût, il faut faire des sacrifices. Merci à eux d’être derrière le club, même s’il y a des moments difficiles.